Un "beau jour", toujours "beau" paraît-il, malgré les conditions climatiques exécrables, malgré les nouvelles du monde les plus atroces, malgré les disparitions qu'on ait pu regretter, malgré la énième défaite du PSG, malgré tout donc, ce "beau jour" là nous sommes venus au monde (à croire qu'on n'avait rien de mieux à faire). Nous arrivons donc, et, bizarrement, côté fonctionnalités, on nous livre assez démunis à vrai dire (on a eu beau râler comme des fous, vers 4 heures du mat, personne nous prenait au sérieux). Enfin, tout de même, nous disposons, dès notre arrivée, d'un ensemble d'outils sensoriels qui, avec le temps, vont s'avérer fort pratiques et qui, en général, sont assez bien foutus, il faut bien le reconnaître (hormis, à mon avis, pour certains choix de design et d'ergonomie quelque peu discutables, mais bon, faudra s'en contenter, le bureau de réclamations reste toujours désespérément muet aux innombrables plaintes, et Dieu sait s'il y en a). Tout ceci est très bien sauf que, hélas, la plupart de ces sens ne sont pas opérationnels à 100% dès le début (du travail bâclé j'vous dis), c'est le cas notamment de nos capacités de perception visuelle.
La vue est, peut-être (sûrement même), le sens qui va le plus influencer notre perception du monde, celui du "réel" qui nous entoure (ou étouffe parfois, c'est selon...) et celui du "virtuel" que nous découvrons peu à peu par l'intermédiaire des représentations visuelles en tout genre (peinture, photographie, cinéma, télévision, informatique, etc.) qui vont constituer, à la longue (et c'est jamais fini), une partie importante de notre bagage culturel (pour certains ce sera de la taille d'une grosse malle, pour d'autres d'un simple porte-monnaie, mais, comme tout le monde le sait, la quantité n'a jamais était un gage de qualité... ce qui, soit dit en passant, m'arrange bien ;-).
Lors des nos premières années de vie, nous allons développer des capacités d'observation et d'interprétation absolument remarquables (
hé pa... c'est quoi ça ? – ça c'est une bouteille de lait ! – mais, pa... pourquoi avoir mit le lait dans une bouteille ? – euh... disons que... et bien parce que... bein... hé-ho, dis-donc, va finir tes devoirs toi !), en nous distinguant des autres espèces du vivant par une faculté étonnante à "voir" des choses tout-à-fait concrètes à partir de représentations parfois très partielles ou sommaires, voire carrément schématiques ou abstraites, comme des simples taches d'encre (la psychologie leur en a même trouvé un usage très instructif
[?] grâce notamment au
test de Rorschach).
Ainsi, un simple crayonnage sur la marge d'un cahier d'écolier peut facilement nous évoquer un objet bien concret du réel, au point même de "visualiser" la chose avec force détails, comme, par exemple, le gribouillage maladroit d'une petite voiture peut nous rappeler avec beaucoup de précision le véhicule familial (ceux qui ont fait plusieurs fois la route des vacances, nationale 7, aller-retour, en dodoche, doivent encore conserver des images bien précises de leur bagnole, si si, je vous assure).
Mieux encore, le dessin d'une petite locomotive peut nous ramener des images bien claires d'un objet que nous n'avons pourtant pas forcément connu en vrai, mais elle surgit directement de notre mémoire comme s'il avait été tout-à-fait réel.
Mais, au delà des interprétations personnelles, avec tout ce que cela suppose comme "filtrage" culturel, nos yeux entretiennent un rapport étroit et privilégié avec le réel, au point que le seul fait d'être témoin d'un événement ou phénomène, aussi étrange qu'il puisse paraître (bon, j'exagère un peu, mais pas tant que ça finalement), nous convainc immédiatement de la véracité de ce que nous avons perçu, même si cela semble défier les raisonnements logiques les plus évidents (certains ont vu des petits hommes verts atterrir sur leur potager, nous dit-on...), malgré tout, être un "témoin visuel" confère une certaine crédibilité naturelle, d'ailleurs, encore aujourd'hui, leur témoignages sont parfois déterminants dans les enquêtes judiciaires.
En fait, nous avons souvent besoin de "voir pour croire", dès lors, il est naturel qu'on accorde du crédit à ceux qui ont vu (ou prétendent avoir vu, et ce n'est pas les habitants de Lourdes qui vont me contredire)...
Toutefois, notre perception visuelle est loin d'être infaillible ou même toujours crédible, au delà des aspects d'interprétation "culturelle" et même de témoignage du réel, ce que nous voyons est parfois uniquement ce que nous croyons voir, ou, plus exactement, ce que notre perception nous laisse voir. C'est à tel point troublant que, depuis longtemps, l'homme s'intéresse à ces "paradoxes" du visible et s'amuse à démontrer les particularités et les limites de notre perception visuelle. Ainsi, un grand nombre de tests, jeux et expériences visuelles ont été imaginés, aujourd'hui regroupés dans ce qu'on nomme "les illusions visuelles", dont j'ai le plaisir de vous présenter ci-après quelques exemples pour le moins parlants (
des "exemples visuels parlants", fallait la faire celle-là ;-).
Illusions sur notre perception des formes et surfaces
Regardez attentivement ces images, aucune ne possède de ligne inclinée ou courbe, il s'agit toujours des lignes droites, mais le jeu de contrastes et couleurs trompe notre perception et nous fait croire que rien n'est vraiment droit :
Dans les images suivantes, le jeux des lignes, formes et couleurs piègent notre perception en nous laissent voir de surfaces ondulées en relief :
Ici, ce sont des surfaces superposées que nous voyons, pourtant, dans l'absolu, il ne s'agit que des simples lignes et formes, plaines ou vides, mais qui nous font percevoir des plans différents :
Illusions sur notre perception des mouvements
En plus des illusions sur les formes et les surfaces, nos yeux sont capables d'animer une image qui est pourtant on ne peut plus statique, voici quelques exemples sur des mouvement rectilignes horizontaux :
Voici des mouvements plus complexes rendus par des damiers :
Des illusions de "zoom" sont aussi possibles :
Ainsi que d'autres formes de mouvements, certains plus aléatoires :
Enfin, les plus spectaculaires peut-être, se sont les illusions de mouvements circulaires :
Après avoir vu tous ces pièges que notre vue est incapable de déjouer (et ce n'est qu'une toute petite liste des phénomènes optiques qui peuvent conditionner notre perception visuelle), on se demande bien si notre perception du réel, celui de tous les jours, et même du virtuel (
notre fameux porte-monnaie culturel, enfin, je parle pour moi là), ne dissimulent pas aussi un nombre incalculable d'illusions dont nous sommes, à nos dépends finalement, les plus hardants défenseurs ? ... qui n'a jamais dit : "si si, je te jure, je l'ai vu de mes propres yeux vu !" ?
Nous sommes en permanence à la merci de toutes sortes de manipulations humaines, sociales, politiques, économiques, médiatiques et j'en passe... mais, après tout, la réalité, toute crue, n'est elle pas déjà une gigantesque manipulation de nos sens, de nos capacités de perception et d'interprétation, de nos facultés d'analyse et de compréhension du monde ?
Bref, lorsque certains croient sans voir, d'autres attendent de voir pour croire, mais comment peuvent-ils être sûr de la justesse de leur perception lorsque tout, ou presque, n'est peut-être qu'illusion ?
Bein, voyons...
Sources documentaires et iconographiques
- L'ensemble des exemples des illusions visuelles, sont tirés des travaux de M. Akiyoshi Kitaoka (Professeur au Département de Psychologie de l'Universite de Ritsumeikan à Kyoto, Japon) : Akiyoshi's Illusion Pages
- Les dessins de la voiture et de la locomotive
- A catalogue of illusions [en]
- Illusions et paradoxes
- 77 Optical Illusions & Visual Phenomena [en]
- Illusions d'optique